C’est avec enthousiasme que nous nous retrouvons ce samedi 23 Janvier sur le parking des Gorges d’Apremont. Après une rapide présentation, Catherine nous explique la formation de la platière où nous nous trouvons et des chaos de grès (roche formée d’agrégation de sable). C’est une ancienne dune formée par la dernière visite de la mer il y a environ 35 millions d’années. Les blocs si caractéristiques de la forêt de Fontainebleau sont issus de l’érosion et de la casse de ces platières.
Ravie de ces explications, nous nous engageons sur le sentier au milieu des bruyères et des fougères aigles brûlées par le froid.
Après au moins 15 secondes de marche intensive, nous nous arrêtons autour d’un rocher du haut de la platière. En grattant les petites plaques grisâtres le recouvrant, nous découvrons une couleur verte, signe qu’une activité photosynthétique a lieu sous ces petites croûtes à l’allure peu avantageuse. La photosynthèse, c’est une algue qui s’en occupe, le champignon lui s’occupe d’apporter protection, eau, vitamines…car oui un lichen, c’est avant tout la symbiose d’une algue et d’un champignon. Ces petites croûtes bien accrochées au rocher sont des lichens dit « crustacés » et ils sont presque une dizaine d’espèces sur ce rocher. On y trouve également un lichen « foliacé », on reconnaît cette forme au fait qu’on peut détacher le thalle de son substrat tout en conservant intègre sa structure.

Les lichens ont un rôle écologique important (comme toute espèce ayant sa place dans un écosystème) mais ces derniers sont souvent négligés alors que ces espèces font parties de ces plantes pionnières qui dégradent la roche. Cette dégradation est une des premières étapes permettant la formation d’un sol et l’implantation d’autres espèces n’ayant pu s’installer sur la roche nue. Par ailleurs, sous leur air de chewing gum abandonné par les randonneurs, ces lichens sont précieux et se développent lentement : 1-2 cm / an pour les plus rapides, 1 mm / an pour les plus lents. Une de ces petites croûtes peut donc être plus âgée que vos parents ou vos grands-parents !

Nous continuons notre marche emplis d’humilité envers ces lichens sur lesquels nous marchons toute la journée. Ils ne manquent d’ailleurs pas de nous rappeler leur présence en formant des plaques glissantes sur les rochers mouillés que nous empruntons, nous forçant à alléger le pas.
Sur un autre rocher, nous abordons la question de la dispersion et de la reproduction chez les lichens, il est l’heure de sortir notre armée de loupe, menée par la reine de toutes : la loupe binoculaire de terrain Nikon. Plusieurs structures nous sont alors montrées et expliquées :

La multiplication végétative : des structures incluant champignons et algues se forment et peuvent être mécaniquement cassées et emportées par les semelles de nos Timarchiens en randonnée. Ces structures portent des noms barbares comme « isidie » ou encore des « soralies » emplies de « sorédies ». Elles permettent à la symbiose d’être conservée tout en dispersant ;
La reproduction sexuée : elle est réservée au champignon, qui va former seul une structure appelé « apothécie » dans lesquels nous retrouvons les spores du champignon. En dispersant seul, le champignon devra retrouver un partenaire algue pour reformer le thalle typique d’un lichen.

Nous repartons, très impressionnés, vers le bord de la platière. Nous descendons vers la vallée où nous trouvons sur les bords du sentier et les rochers avoisinants un festival de Cladonia aux apothécies rouges et d’autres lichens sous toutes leurs formes. Les estomacs commençant à gronder, nous remontons au sommet de la platière afin de partager fromage, saucisson et petits gâteaux à la myrtille. Catherine profite de ce moment privilégié pour narrer l’histoire de notre association aux jeunes Timarchiens avides de savoir.

Nous finissons cette initiation en explorant l’autre côté de la forêt. La diversité y est moins importante mais Séverin complètera rapidement ce manque par un interlude entomologique. Nous trouvons néanmoins de nouveaux lichens, comme le fameux Pertusaria amara, pour lequel seuls les valeureux tenteront l’expérience gustative.